Avec la coordination du collectif « Forbidden stories », 17 médias viennent de publier, ce dimanche, 18 juillet, une enquête qui suscite de nombreuses interrogations concernant les assertions avancées contre le Maroc.

Les meneurs de l’enquête de « Forbidden stories » et Amnesty Lab affirment avoir eu accès, à «50.000 numéros de téléphone potentiellement ciblés par Pegasus». Le mot «potentiellement» mis en chapeau de présentation de cette enquête change en certitude dans le corps du long article publié sur l’utilisation frauduleuse du logiciel espion de la société israélienne NSO.

«Les listes de numéros de téléphone sélectionnés comme des cibles dans l’outil de NSO par plusieurs de ses clients, que l’organisation « Forbidden stories » et Amnesty international ont partagées avec 16 rédactions, confirment que l’opérateur marocain de Pegasus a visé, de manière systématique, les journalistes critiques du pouvoir, et des dirigeants des grandes rédactions du pays», soulignent les enquêteurs.

L’identité de cet opérateur n’a été aucun moment révélé, mais les enquêteurs parlent du «Maroc», d’une manière vague, sans préciser exactement qui utilise dans le pays l’outil incriminé.

«Le Maroc a entré dans l’outil de NSO un numéro de téléphone qui était attribué au polémiste Eric Zemmour, auteur en février 2019 d’une violente diatribe contre les migrants marocains sur le plateau de LCI, et ciblé plus tard cette année-là par le logiciel-espion sans que l’on sache si les deux événements sont liés», écrivent notamment les enquêteurs.

La question qui se pose en toute logique : pourquoi le Maroc espionnerait ce penseur dont les idées sont connues de tous. En plus, en quoi des positions aussi tranchées que celles de Zemmour sur les migrants marocains pourraient justifier le supposé espionnage du mystérieux «opérateur marocain» ?

«Dans d’autres cas, le raisonnement des espions marocains semble brumeux : la journaliste du Monde dont le téléphone a été visé et infecté ne travaille sur aucun dossier lié de près ou de loin au Maroc, tout comme d’autres journalistes dont les numéros ont été sélectionnés par le client marocain de NSO Group. Il est possible qu’ils aient été visés principalement pour accéder à leur carnet d’adresses - et acquérir ainsi les numéros d’autres cibles», supposent les enquêteurs en parlant du client marocain non identifié de NSO. Cela ne les empêche pas d’utiliser le terme générique «Le Maroc» pour désigner le méchant espion.

«A plusieurs reprises, le consortium « Forbidden Stories » et le Security Lab d’Amnesty ont pu techniquement déterminer que l’infection avec Pegasus avait été couronnée de succès. C’est le cas notamment d’Edwy Plenel, le fondateur de Mediapart». Là encore, des observateurs ayant lu l’enquête s’étonnent face à cette assertion concernant ce grand journaliste qui a eu toute la latitude à exprimer son point de vue à Essaouira sur invitation du Maroc officiel.

Tout l’argumentaire repris dans l’enquête reprend les conclusions avancées par le Security Lab d’Amnesty International. Or, même si cette organisation est reconnue pour certaines de ses actions en faveur des droits de l’Homme dans certains pays, son manque de neutralité concernant le Maroc a été déjà dénoncé par les autorités du Royaume.

Par ailleurs, le climat délétère de travail dénoncé dernièrement à l’intérieur d’Amnesty montre que cette ONG infaillible manque des ressources humaines nécessaires pour être apte à mener des enquêtes irréprochables.

Au demeurant, des observateurs se demandent pourquoi de telles enquêtes ciblant le Maroc sont publiées à une période précise de l’année en s’en prenant en particulier à ses services sécuritaires. Pourtant, relèvent-ils, l’efficacité de ces services est mondialement connus et reconnue.

En plus du Maroc, l’enquête en question incrimine notamment l’Inde, le Rwanda, l’Arabie Saoudite ou encore la Hongrie, entre autres. Les autorités indiennes ont été les premières à répondre du tac au tac aux accusations portées à l'encontre de leur pays.

«Les allégations concernant la surveillance par le gouvernement de personnes spécifiques n'ont aucune base concrète ou vérité associée à cela», a répliqué l’Inde. Et ce pays de conclure : «Dans le passé, des allégations similaires ont été faites concernant l'utilisation de Pegasus sur WhatsApp par l'État indien. Ces rapports n'avaient également aucun fondement factuel et ont été catégoriquement démentis par toutes les parties, y compris WhatsApp devant la Cour suprême indienne. Ce reportage apparaît donc également comme une croisade/campagne menée à l’aveuglette, basée sur des conjectures et des exagérations visant à calomnier la démocratie indienne et ses institutions».