Une course contre la montre est lancée pour sauver les rhinocéros blancs du Nord, qui ne sont plus que cinq au monde, et les experts tentent de mettre au point une fécondation in vitro de la dernière chance.

"Ca va être une rude bataille", a admis auprès de l'AFP Randy Rieches, le conservateur de ces mammifères au zoo Safari Park de San Diego.

La disparition d'Angalifu, rhinocéros mâle d'environ 44 ans décédé de sa belle mort dimanche dans ce zoo de Californie, a tiré le signal d'alarme au sein de la communauté scientifique.

Les autres survivants de cette espèce se trouvent tous en captivité, dont une femelle au même zoo de San Diego, une autre en République Tchèque, deux femelles et un mâle, le seul de l'espèce, au Kenya.

Les gardiens du zoo de San Diego avait essayé sans succès d'accoupler leurs deux rhinocéros.

Un autre mâle de cette espèce, nommé Suni, était mort en octobre dans la réserve kényane d'Ol Pejeta.

Le premier problème, c'est que les cinq survivants ne sont plus de première jeunesse: presque tous ont dépassé la quarantaine, pour une espèce dont l'espérance de vie est de 43 ans. Seule une femelle au Kenya est encore jeune, née en 2000.

Les pistes possibles

"On évalue toute une série d'options", y compris la fécondation in vitro ou une insémination artificielle, a ajouté M. Riesches, tout en admettant qu'ils n'avaient "pas grand chose à quoi s'accrocher à ce stade".

Originaires d'Afrique centrale et de l'Est, ces herbivores imposants ont été décimés par les braconniers, pour les vertus aphrodisiaques attribuées à leur corne, très prisée dans la pharmacopée asiatique.

Cette espèce a aussi quasiment disparu du fait des guerres en Afrique, selon la World Wildlife Foundation.

Il y a 10 ans, il restait encore 30 animaux en liberté dans le Parc national Garamba de la République démocratique du Congo (RDC).

Déjà conscients qu'ils étaient menacés d'extinction, les conservateurs avaient prévu d'en transporter quelques-uns au Kenya mais, au final, les autorités de la RDC avaient refusé qu'ils quittent le pays.

"Ca a été une mauvaise décision car ils n'ont pas été en mesure de les protéger en raison de l'éloignement", poursuit M. Rieches.

Les braconniers ont pris avantage de la vulnérabilité des rhinocéros. "A un moment donné il y avait des gangs qui venaient de sept pays différents", se désole l'expert.

"Maintenant c'est devenu horrible parce que le prix des cornes de rhinocéros a flambé et les braconniers sont armés jusqu'aux dents. Les gardiens du parc sont complètement dépassés", renchérit-il.

"Ils mettent littéralement leur vie en jeu pour arrêter ce trafic", insiste-t-il.

Les scientifiques et les représentants des parcs des quelques pays qui ont encore des rhinocéros travaillent main dans la main pour tenter d'éviter une issue fatale. "Tout le monde essaie des méthodes différentes mais travaille avec les mêmes échantillons" de semence de rhinocéros.

L'idée est soit de fertiliser des ovules en laboratoire, soit de féconder une femelle rhinocéros blanc du Sud, une espèce dont il reste beaucoup plus de spécimens.

On prendrait alors l'une des jeunes femelles issues de cette combinaison pour l'inséminer avec le sperme d'un autre mâle rhinocéros blanc du Nord. Mais ils ne seraient alors pas des rhinocéros blanc du Nord totalement purs, fait valoir Randy Rieches.

Il précise que c'est un travail de longue haleine, qui prendra plusieurs années, d'autant plus que la gestation d'un rhinocéros dure près d'un an et demi.

Pour ce conservateur qui travaille depuis 36 ans au zoo de San Diego et qui siège au conseil d'administration de la Fondation internationale des rhinocéros, cette quête est personnelle.

"J'ai consacré une grande partie de ma vie" à ces animaux à l'épaisse peau plissée si caractéristique, "ce serait absolument terrible d'assister de mon vivant à "la mort du dernier rhinocéros blanc du Nord"