Mathilde Karpé travaille à Abidjan dans la vente de médicaments. La nuit, elle officie en tant que « Dozo », un genre de brigadier traditionnel censé faire régner l’ordre.

Tous les soirs, cette commerçante enfile sa tenue beige poinçonnée de multiples grigris et sort jouer les justicières. Dans les rues de Korhogo, où elle mène ses fonctions parallèles, Mathilde est très crainte. On lui prête comme à tous ses confrères des pouvoirs mystiques.

Luttant contre les incivilités, ce corps de métier n’est pourtant pas reconnu par l’Etat. « Je dispose cependant d’une carte de travail au même titre que mes collègues hommes et j’effectue mes tâches à leurs côtés ». Interrogée par Brut, Mathilde assume son identité masculine.

Ancienne étudiante en Droit, elle a abandonné les bancs de la faculté, convaincue que les esprits qui l’habitaient, ne voulaient pas qu’elle continue « Quand j’arrivais à l’amphithéâtre, je me mettais à convulser. Mes djinns tentaient de me faire comprendre que ma place était ailleurs. Si j’avais poursuivi mon cursus je n’aurais pas été en mesure de m’appliquer à la tâche qui m’était vraiment destinée » a-t-elle expliqué face aux caméras.

Très à l’aise dans son rôle, Mathilde patrouille en compagnie de ses camarades, fière de ce qu’elle est devenue. « Le Dozo est un protecteur de son quartier, à l’époque dans les villages, quand il y avait une menace, il n’hésitait pas à offrir sa vie pour sauver celles des gens ».

Véhicules mal garés, surveillance de personnages louches, intervention en cas de bagarres, d’agressions ou de vols à l’arraché (…), à chaque jour sa peine, la brigadière ne recule devant rien.

« Je suis la seule à aller sur le terrain. J’aime ce que je fais, j’aime cette tenue et ce qu’elle symbolise… ». En 15 ans d’exercice, Mathilde n’a jamais voulu abandonner. Bien intégrée au sein de son groupe, la Dozo espère avoir encore de longues années de pratique devant elle.