Dans le cadre de la 20ème édition du Festival International du Film de Marrakech, Pouvoirs d'Afrique est allé à la rencontre de la réalisatrice franco-sénégalaise Ramata-Toulaye Sy pour parler de son tout premier long-métrage intitulé « Banel & Adama », en compétition officielle.

« Banel & Adama » a été sélectionné dans plusieurs festivals internationaux, notamment au Festival de Cannes 2023 et au Festival international du film de Toronto 2023. Il représentera également le Sénégal aux Oscars en 2024. Ce film a été salué par les critiques qui l'ont décrit comme un "début accompli d'une réalisatrice prometteuse".

À travers les personnages de Banel et Adama, sont explorées des aspirations à l'émancipation et à la liberté au sein d'une communauté traditionnelle dans un village du Fouta au Sénégal.

Entretien avec sa réalisatrice Ramata-Toulaye Sy, réalisé par Ibtissam Ouazzani

Ramata-Toulaye Sy, de quoi parle votre film « Banel & Adama » ?

C'est l'histoire de Banel et  Adama, deux jeunes gens qui s'aiment. C'est une histoire qui se déroule au Sénégal au Fouta et cet amour va porter le chaos dans la communauté.

C'est avant tout une histoire de femme, c'est une femme qui cherche à s'émanciper, c'est une femme qui cherche à liberté, qui est en quête d'absolu aussi. Donc je pense que toutes les femmes au monde, et aussi les hommes, peuvent se reconnaître en Banel et Adama.

Quels messages cherchez-vous à passer à travers l’histoire Banel et Adama ?  

C'est vraiment un film que je voulais cohérent et que je voulais réaliste par rapport aux coutumes et aux traditions. Ce n'est pas un film qui dit que l'homme est meilleur ou que la femme est meilleure. Je pose vraiment juste les conditions, les réalités de ce que les gens vivent, que ce soit les hommes ou les femmes, parce qu'Adama a aussi beaucoup de difficultés en tant qu'homme dans cette société. Et essayer de trouver des solutions.

Serait-ce votre façon de décrire certains problèmes de la société sénégalaise et plus largement africaine ?

C'est vraiment une histoire de communauté et d'individualité. C'est comment trouver son individualité au sein d'une communauté surtout dans ces traditions.

Le personnage de Banel aussi qui est un personnage très complexe, qui est un peu égoïste, qui pense beaucoup à elle et qui est très individualiste… Ça peut susciter des débats dans nos communautés très africaines.

Il y a souvent un peu voire beaucoup de soi dans une création artistique, est-ce aussi le cas pour vous ?

Il y a beaucoup de moi dans le personnage de Banel ; je suis très rebelle, je suis très indépendante et je suis vraiment en quête de liberté. Donc oui, il y a énormément de moi dans le film.

« Banel & Adama » a été sélectionné dans plusieurs festivals. Qu'est-ce que ces sélections représentent pour vous ?

Ça représente énormément au Maroc puisqu'il y a une grande communauté sénégalaise au Maroc. C'est en Afrique. Et c'est vrai qu'il y a eu beaucoup de films africains cette année à Cannes et dans tous les festivals.

Je suis très contente de voir que le cinéma africain trouve enfin sa place dans les festivals internationaux.

Comment ne pas tomber dans les clichés lorsqu'on réalise un film sur l'Afrique ?

Il faut faire attention. Je pense qu'il est temps pour nous, jeunes réalisateurs, de raconter d'autres histoires qu'on a l'habitude de voir en Afrique, d'aller au-delà du cinéma naturaliste et essayer les cinémas de genre par exemple. Mon film, c'est du réalisme magique, donc il faut essayer de ne pas faire que du cinéma avec des problèmes de société.

Il faut être honnête et écrire le film qu'on a envie de faire, de voir et de ne pas écrire juste ce que les gens attendent de nous. Je pense, qu'en tant qu'Africaine, quand on est honnête avec nous, on tombe difficilement dans les clichés.

Quels sont vos futurs projets ?

Pour l'instant, je tourne avec « Banel & Adama » qui représente le Sénégal aux Oscars donc je fais beaucoup de festivals, il sort dans beaucoup de pays. Donc là j'accompagne beaucoup le film.