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Lieux de pouvoirs

Processus de Luanda : Une impasse entre Kinshasa et Kigali

Olivier Nduhungirehe, le chef de la diplomatie rwandaise (à droite) et son homologue congolaise, Thérèse Kayikwamba Wagner, lors d’une réunion au ministère angolais des Affaires étrangères, le 25 novembre 2024
Olivier Nduhungirehe, le chef de la diplomatie rwandaise (à droite) et son homologue congolaise, Thérèse Kayikwamba Wagner, lors d’une réunion au ministère angolais des Affaires étrangères, le 25 novembre 2024
Mamadou Ousmane
27/11/2024 à 11:20 , Mis à jour le 27/11/2024

Une première version du plan de réconciliation entre Kinshasa et Kigali avait été présentée lors d’une réunion tripartite au mois de septembre. Mais cette feuille de route avait été refusée par la ministre congolaise des Affaires étrangères, Thérèse Wagner. Et maintenant ?

Le sixième rendez-vous ministériel entre la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda, tenu dans la capitale angolaise sous l’égide du président João Lourenço, s’est conclu sans avancée décisive. Cette nouvelle tentative de médiation, inscrite dans le cadre du Processus de Paix de Luanda initié en 2022, laisse une fois de plus entrevoir la profondeur des divergences entre les deux pays voisins, en proie à des tensions récurrentes. 

En l’absence de communiqué final, l’Angola s’est contenté de mentionner que les discussions avaient porté sur les questions de sécurité et de paix dans l’est de la RDC, une région meurtrie par des décennies de conflits armés et de déplacements de populations. Thérèse Kayikwamba Wagner, ministre des Affaires étrangères de la RDC, et son homologue rwandais Olivier Nduhungirehe, ont pourtant fait le déplacement à Luanda, symbolisant une volonté apparente de dialogue. Mais les désaccords profonds et les accusations mutuelles semblent maintenir le statu quo. 

Cette réunion intervient dans un contexte marqué par des contradictions flagrantes sur les résolutions de la cinquième réunion ministérielle, tenue quelques mois plus tôt. Alors que Kinshasa accuse Kigali de soutenir activement le groupe rebelle M23, Kigali dénonce en retour l’hostilité de la RDC envers les populations rwandophones et les incursions militaires congolaises près de ses frontières. Ces tensions ont poussé João Lourenço à intensifier ses efforts diplomatiques en organisant des entretiens bilatéraux distincts avec Félix Tshisekedi et Paul Kagame, sans pour autant parvenir à rapprocher les positions des deux dirigeants. 

Début novembre, un espoir fragile semblait émerger avec le lancement à Goma d’un mécanisme de vérification ad hoc renforcé. Cet organe, chargé de surveiller et d’évaluer la mise en œuvre des engagements pris dans le cadre du Processus de Luanda, vise à garantir une transparence dans les interactions sécuritaires entre les deux pays. Cependant, son efficacité reste à démontrer, tant les dynamiques sur le terrain demeurent complexes et sujettes aux interférences politiques. 

Un climat régional tendu

La persistance des tensions entre Kinshasa et Kigali dépasse le cadre bilatéral. Elle menace de déstabiliser davantage la région des Grands Lacs, où les alliances fluctuantes et les intérêts géopolitiques exacerbent les conflits. L’implication de nouveaux acteurs dans le Processus de Luanda, tels que Mambu Sita Sumbo, récemment nommé haut représentant du président Tshisekedi pour le suivi de la feuille de route, témoigne de la complexité de cette médiation. Lors de son audience avec João Lourenço, Sumbo a souligné l’urgence d’une approche pragmatique et coordonnée pour résoudre cette crise. 

Alors que les attentes initiales portées par le Processus de Luanda s’amenuisent, la lassitude gagne les partenaires régionaux et internationaux. Les initiatives de médiation se heurtent à un mur d’intransigeance, amplifié par des enjeux économiques et sécuritaires souvent inconciliables. Si la volonté affichée de maintenir le dialogue peut être perçue comme un signe positif, l’absence de résultats concrets alimente le scepticisme quant à la capacité des parties à atteindre une paix durable. 

Le prochain cycle de discussions, dont la date n’a pas encore été annoncée, devra impérativement être accompagné d’une pression accrue de la communauté internationale pour éviter que le Processus de Luanda ne devienne un énième cadre de dialogue sans lendemain. En attendant, les populations de l’est de la RDC continuent de subir les conséquences dévastatrices de cette impasse politique.