Les accusations portées par Panduleni Itula, si elles se confirment, risquent de provoquer une crise institutionnelle d’envergure en Namibie, la plus grave depuis l’indépendance du pays.
La Namibie, considérée comme un bastion de stabilité en Afrique australe, fait face à une crise politique majeure. Samedi 30 novembre, Panduleni Itula, principal opposant à la Swapo, parti historique au pouvoir depuis l’indépendance en 1990, a annoncé qu’il ne reconnaîtra pas les résultats des élections présidentielles en cours. Un scrutin entaché par des défaillances organisationnelles, suscitant des accusations d’irrégularités et une contestation grandissante.
« Nous ne pouvons qualifier ces élections de libres, équitables et légitimes », a déclaré Panduleni Itula lors d’une conférence de presse organisée à Windhoek, la capitale. Cette déclaration marque un point de rupture dans un pays où la démocratie a souvent été citée en exemple sur le continent. Les critiques de l’opposant portent sur des défaillances majeures observées tout au long du processus électoral, qui ont empêché de nombreux citoyens d’exercer leur droit de vote.
La Commission électorale de Namibie (ECN) a invoqué des problèmes logistiques : manque de bulletins de vote, pannes fréquentes des tablettes électroniques utilisées pour vérifier l’identité des électeurs, et dysfonctionnements techniques généralisés. Ces difficultés ont provoqué une désorganisation qui, selon Panduleni Itula, constitue une atteinte grave à la transparence et à l’équité du scrutin.
Un duel serré au sommet de l’État
Avec 42 % des 1,5 million d’électeurs inscrits, les jeunes Namibiens forment un groupe déterminant dans ces élections. Touchés de plein fouet par le chômage et les inégalités sociales, ils ont massivement investi les bureaux de vote pour exprimer leur mécontentement face à une classe politique jugée incapable de répondre à leurs attentes. Cependant, pour bon nombre d’entre eux, les obstacles logistiques et les longues heures d’attente ont eu raison de leur volonté.
Pour Panduleni Itula, cette situation est une trahison des principes démocratiques que la Namibie affirme défendre. Âgé de 67 ans, cet ancien dentiste devenu avocat et leader des Patriotes Indépendants pour le Changement (IPC) milite pour une refonte totale du processus électoral. « Ces élections doivent être annulées et un nouveau vote organisé pour garantir que chaque citoyen puisse exercer son droit démocratique », a-t-il martelé.
Les résultats, encore attendus, annoncent une bataille acharnée entre Netumbo Nandi-Ndaitwah, candidate de la Swapo, et Panduleni Itula. Ce dernier, arrivé deuxième lors des élections présidentielles de 2019 avec 29,4 % des suffrages, espère mobiliser un mécontentement croissant contre un parti dominant accusé de corruption et de mauvaise gestion.
La Swapo, autrefois perçue comme une force unificatrice, fait aujourd’hui face à une défiance croissante. Si en 2019, le président sortant Hage Geingob avait été réélu dès le premier tour avec 56 % des voix, son successeur pourrait bien devoir affronter un second tour inédit, selon plusieurs analystes.
Le climat politique tendu marque une étape critique pour la Namibie, pays désertique qui a longtemps cultivé une image de stabilité démocratique.