Les taux d'intérêt des prêts des créanciers officiels ont doublé pour dépasser les 4%, tandis que ceux des créanciers privés ont atteint des niveaux record, dépassant 6%, un pic jamais observé depuis 15 ans.

En 2023, la situation de la dette des pays en développement a atteint des sommets inquiétants, avec des paiements d'intérêts en forte hausse, creusant davantage les fossés économiques dans les nations les plus vulnérables. Selon un rapport de la Banque mondiale, les pays en développement ont consacré des sommes historiques au remboursement de leur dette extérieure, plongeant de plus en plus dans un cercle vicieux de dépendance financière.

En effet, les coûts d'intérêts ont frôlé les 406 milliards de dollars, un chiffre record en vingt ans, accentuant ainsi une pression insoutenable sur les budgets nationaux. Cette situation compromet gravement les investissements dans des secteurs cruciaux tels que la santé, l'éducation et l'environnement, exacerbant la précarité des populations, particulièrement en Afrique subsaharienne.

La dette extérieure des pays en développement a atteint un niveau historique de 1,4 trillion de dollars en 2023, avec des coûts d'intérêts atteignant des seuils jamais observés depuis deux décennies. L'accroissement rapide des paiements d'intérêts, qui ont grimpé de près d'un tiers pour atteindre 406 milliards de dollars, a eu des répercussions désastreuses sur les économies de nombreux pays, en particulier ceux les plus fragiles.

Les pays bénéficiant de l'Association internationale de développement (IDA), l'organe de financement de la Banque mondiale destiné aux pays les plus pauvres, ont été les plus touchés. Ces nations ont payé un montant record de 96,2 milliards de dollars en intérêts pour servir leur dette. Si les remboursements du principal ont diminué de 8 %, les coûts des intérêts ont explosé, atteignant 34,6 milliards de dollars en 2023, un chiffre quatre fois supérieur à celui observé il y a une décennie.

Cette évolution est alarmante, surtout pour les nations africaines qui dépendent principalement de l'aide multilatérale. La pression est d'autant plus grande que les conditions de crédit se sont durcies sur les marchés financiers mondiaux. En conséquence, les créanciers privés ont perçu près de 13 milliards de dollars de plus que ce qu'ils avaient prêté aux pays éligibles à l'IDA.

 En revanche, les institutions multilatérales, telles que la Banque mondiale, ont injecté près de 51 milliards de dollars supplémentaires pour soutenir ces économies fragilisées. Ces investissements représentent environ un tiers de la somme totale injectée par la Banque mondiale.

Indermit Gill, économiste en chef du Groupe de la Banque mondiale, a tiré la sonnette d'alarme sur cette évolution inquiétante. Selon lui, les institutions multilatérales jouent désormais un rôle de plus en plus important en tant que "prêteurs de dernier recours", une fonction qu'elles n'étaient pas censées assumer à l'origine. Il a souligné l'inefficacité d'un système financier où l'argent quitte les économies pauvres plutôt que d'y entrer, compromettant ainsi la stabilité et le développement à long terme de ces pays.

La pandémie de COVID-19 a exacerbé cette crise de la dette en augmentant de manière significative l'endettement des pays en développement, une tendance qui s'est poursuivie avec la hausse des taux d'intérêt mondiaux. À la fin de 2023, la dette extérieure totale des pays à revenu faible et moyen a atteint 8,8 trillions de dollars, enregistrant une hausse de 8 % par rapport à 2020. Les pays éligibles à l'IDA ont vu leur dette augmenter de manière encore plus marquée, avec une progression de près de 18 %, portant leur dette extérieure totale à 1,1 trillion de dollars.

Le rapport de la Banque mondiale souligne les efforts de l’institution pour améliorer la transparence des données relatives à la dette. À travers un processus de réconciliation "prêt par prêt", la Banque mondiale a réduit la marge d'erreur dans les données de la dette des pays éligibles à l'IDA, atteignant un taux de correspondance de 98 %, contre seulement 90 % auparavant. Haishan Fu, statisticien en chef de la Banque mondiale, a mis en avant l'importance de cette transparence, précisant que des données complètes sur les passifs des gouvernements peuvent faciliter les nouveaux investissements, réduire la corruption et prévenir des crises de dette coûteuses à l'avenir.