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Lieux de pouvoirs

Désunion. La CEDEAO face à la fronde du Sahel

CEDEAO
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Mamadou Ousmane
14/12/2024 à 13:45 , Mis à jour le 17/12/2024

Le sommet de la CEDEAO tenudimanche 15 décembre à Abuja, au Nigeria, a été marqué par une atmosphère lourde de tensions et d’incertitudes. Mais l’absence remarquée du Mali, du Burkina Faso et du Niger révèle l’ampleur du contentieux profond entre ces États du Sahel et la communauté ouest-africaine.

Durant deux jours, les discussions se sont concentrées sur des thèmes clés tels que la bonne gouvernance, l’intégration régionale, ainsi que la paix et la sécurité. L’urgence de mettre en place une force d’attente ouest-africaine pour combattre le terrorisme figure parmi les priorités affichées par la CEDEAO. Lors de la cérémonie d’ouverture, Omar Alieu Touray, président de la Commission de la CEDEAO, a souligné « les circonstances particulièrement difficiles » auxquelles la région est confrontée, évoquant des obstacles économiques et sécuritaires majeurs.

Cependant, derrière ces discussions officielles se profile une question bien plus délicate : l’avenir des relations entre la CEDEAO et les trois États sahéliens. Depuis les coups d’État survenus à Bamako, Ouagadougou et Niamey, les tensions se sont exacerbées, et ces pays ont annoncé leur retrait de la communauté. Ce départ constitue un coup dur pour une organisation qui se veut un vecteur d’intégration et de solidarité régionale.

Les ministres réunis à Abuja se trouvent face à un dilemme de taille : maintenir la ligne dure adoptée contre les changements politiques au Sahel ou opter pour une stratégie de dialogue susceptible de réintégrer ces pays dans le giron de la CEDEAO. Le bureau du Parlement de la communauté a proposé une mesure extraordinaire visant à proroger le délai de retrait des trois États sahéliens, arguant qu’une telle démarche permettrait d’éviter une désintégration de la communauté. Cette suggestion reste cependant controversée.

Pour certains membres influents, une approche pragmatique s'impose, reconnaissant l’importance stratégique du Mali, du Burkina Faso et du Niger dans la lutte contre le terrorisme et l’économie régionale.

Quid de l'avenir de la CEDEAO ?

La fracture actuelle souligne les limites de l’approche adoptée jusqu’ici par la CEDEAO. La suspension de ces trois États, initialement conçue comme une sanction temporaire, semble aujourd’hui s’enraciner dans un conflit structurel plus profond. Les dirigeants des pays sahéliens justifient leur rejet de la communauté par un discours de souveraineté retrouvée, affirmant que les injonctions de la CEDEAO reflètent des intérêts étrangers plus que régionaux.

Ce sommet, bien que censé se concentrer sur les objectifs de paix et d’intégration, risque de mettre en évidence les divisions internes d’une organisation à la croissée des chemins. Le résultat des délibérations des chefs d’État ce dimanche pourrait redéfinir l’équilibre politique et diplomatique en Afrique de l’Ouest, tout en testant la capacité de la CEDEAO à surmonter ses propres contradictions.