Le score est sans appel, certes. Mais il soulève pléthore de questions, d’abord chez la population tunisienne et ensuite chez les observateurs internationaux. Les 2.438.954 voix, soit 90,69 % des suffrages exprimés, totalisées par Kais Saied, selon la Haute Autorité indépendante pour les élections, soulèvent de sérieux doutes.
Il y a tout d’abord ce taux de participation particulièrement bas, 29%, soit moins du tiers de la population qui était appelée aux urnes. Cela représente 2.808.548 votants sur 9.753.217 électeurs inscrits, un chiffre nettement inférieur à celui des précédentes élections post-printemps arabe. Cette baisse de participation reflète un désengagement général des électeurs envers le processus politique, et une méfiance généralisée chez des citoyens tunisiens complètement désabusés par plusieurs années d’instabilité politique.
Outre ce taux de participation qui met à mal la légitimité de l’élection, le scrutin a été marqué par l’absence de toute opposition réelle. «Les autorités tunisiennes ont porté atteinte à l’intégrité de l’élection présidentielle du 6 octobre 2024 en amendant la loi électorale seulement quelques jours avant le scrutin. Les autorités ont exclu ou arrêté des candidats de l’opposition et pris des mesures arbitraires à l’encontre d’opposants politiques, de médias indépendants et de la société civile», note l’ONG Human Right Watch.
Sur les réseaux sociaux, nombreux sont les tunisiens qui affichent leur frustration et leur rejet de ce scrutin. «A voté, sans conviction. C’est la pire expérience électorale de ma vie, à l’image du mandat de Kais Saied », s’insurge sur X, anciennement Twitter, cet électeur déçu.
Au cours de son premier mandat, le président sortant, Kais Saied a renforcé son pouvoir en emprisonnant de nombreux opposants et en réformant les institutions pour accroître son autorité. Sa stratégie semble avoir porté ses fruits, consolidant ainsi son emprise sur le pouvoir. Son principal adversaire, Ayachi Zammel, a obtenu 7,4 % des voix. Sa campagne, si on peut la nommer comme tel, a été compliquée par son emprisonnement pendant une grande partie de la période électorale et par des condamnations liées à des infractions liées au scrutin.